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18/03/2007 à 23:14 par Hans, haarig Alto Spieler

1 réponse

Vielen Dank !

Voila maintenant deux jours qu'Hans a changé d'identité.

Il s'en souvient. Il etait en voiture, lancé sur le ruban d'asphalte en direction de Aachen, borne kilométrique 477. L'approche de l'Allemagne et de ses autoroutes a vitesse libre lui donnaient des frissons dans le dos. La Belgique, dont sa voiture foulait de ses pneus vierges le sol béni par la grace, etait bien singuliere. La flute et la trompette semblaient y etre venerees comme les vaches le sont en Inde. Il se souvient d'un homme qui, a la frontiere belge, avait ete arrete par la police, et dont il avait observé la fouille de son véhicule.
Le chien des policiers, un vieux labrador miteux avait trouvé une trompette dans le coffre de l'incriminé. Craignant d'etre tombés sur un trafiquant, les policiers entamerent une fouille complete de la voiture. Hans se souvient bien de cet homme. Lunettes noires vissées sur son nez, manteau en cuir noir, fou de rage, il criait des phrases incomprehensibles, "Tas de cons, y'a atelier trompette ce soir, je vais etre en retard", et avait ajouté "putains de condés". Incomprehensible... Il etait francais...

C'est a l'instant précis ou il depassa le panneau frontiere marqué "Deutschland" que l'ancienne vie de Hans s'acheva. Frappé en pleine poitrine par une force surnaturelle, il sombra dans un profond coma. Plongé dans une lumiere aveuglante, il entama un reve troublant. Il etait dans une grande brasserie. Des alambics remplissaient l'air de leurs borborygmes graves et de leurs effluves sentant bon le houblon. La salle etait vide. Personne. Au fond de la piece, on pouvait apercevoir un grand bar surmonté sur toute sa longueur de tireuses, espacées d'une trentaine de centimetres les unes des autres. Une carafe pleine de biere etait posée sur le bar.
Pas de bec verseur, etait ce une carafe ? Le doute s'installa dans son esprit. Un verre aussi gros ? Impossible.
Plongé dans une reflexion qu'il n'arrivait pas a mener a bien, il ne se rendit pas compte que quelqu'un etait entre par une porte cachée au bout du comptoir. Une dame a la carrure imposante, une quarantaine d'années, blonde, coiffée de deux petites tresses qui lui tombaient sur les epaules, sa poitrine genereuse coincée dans un chemisier bouffant maintenu par une robe vert foncée corsetée, vint s'installer en face de lui.
"Wilkommen in Deutschland" lui dit elle. "Sie sind nicht mehr französich. Ihre neue Name ist Hans, und Sie haben eine neue Leben begonnen."
Elle etait en train de se servir une carafe qu'elle lui tendit remplie pour trinquer. "Pröst", lui dit elle. Le mot etait laché.
Alors que sa premiere gorgée lui descendait le long de l'oesophage, Hans ressentit une grande douleur dans les trefonds de son corps. Cette douleur, intense, le reveilla. Il etait toujours dans sa voiture, toujours sur l'autoroute, au meme endroit. Le temps semblait s'etre arrete.

Quoi qu'il en soit, il sentait que quelque chose en lui avait changé. Cette soudaine envie de saucisses et de biere, ce besoin de changer sa coiffure pour une plus typée 80's, cheveux longs derriere, courts sur le dessus. Son corps aussi avait changé. Il etait plus grand, ses vetements le serraient. Sa belle toison qui faisait autrefois sa reputation s'etait transformée.
Non seulement elle n'etait plus de ce beau brun chocolat qui faisait sa fierté, mais elle avait aussi diminué de volume. En baissant le pare soleil pour ausculter les degats sur son visage, Hans se rendit compte qu'il etait devenu blond, et que ses beaux yeux marrons etaient maintenant d'un bleu limpide.
Il sut qu'une nouvelle vie commencait. Il devenait allemand. Il avait deja oublié son ancien prenom, et savait qu'il ne pourrait plus jamais rouler en Renault, ni manger de bleu d'Auvergne.

Il devenait allemand, mais il ne l'etait pas encore. Il savait que le chemin serait long, mais qu'il ne pouvait plus faire demi tour. Il decida de ne pas lutter et de laisser sa nouvelle maladie evoluer. Lancé a 190 en direction de Wuppertal, il constata une chose. Il faudra qu'il achete soit des reflexes, soit des freins de Porsche.
Quelques frayeurs et quelques heures plus tard, le voila arrivé dans sa ville d'adoption. Il sait qu'il va devoir affronter plusieurs défis. En premier lieu, arriver a recuperer les clés de sa chambre. Puis, plus tard, reussir a communiquer avec les autochtones, et surtout apprendre a s'adapter au climat.
Les premiers contacts sont difficiles. Arrivé a l'accueil de l'hopital qui lui servira de refuge pour les six premiers mois de sa vie, il tombe sur un micro qui semble avoir pris la place de l'hotesse d'accueil. Il decouvrira seulement plus tard qu'elle se cache dans une salle sans fenetre a deux metres du micro. Hans, sur de lui, se lance dans une premiere tirade dans la langue de Goethe. "Was sage ich ? Es ist ein Kap, es ist ein Peninsule". Le micro lui répond "Moment, bitte". Peu chaleureux, mais pas completement hostile. Et Hans semble pouvoir communiquer avec les locaux.
Deux heures trente, sept personnes et un dictionnaire plus tard, il est enfin installé dans son studio. L'endroit est propre, l'ameublement neo stalinien a tendance marxiste se marie bien avec la couleur orange passée du rideau transparent donnant directement sur un balcon communicant avec tous les studios de l'etage.
Il va devoir maintenant reussir a survivre dans cet environnement inconnu qu'il ne comprend pas, et qui ne le comprend pas.

Le lendemain, un samedi.
Hans se reveille. Il est midi. Il se prépare. Il est seize heures. Il sort dans la rue. Rien. Elle est vide, les magasins sont fermés. Shabbat, coutume locale, deuil national ? Hans est perdu. Il ne comprend plus. Deja hier, a 18h, les magasins fermaient, les gens rentraient chez eux, la ville etait morte. Seuls quelques punks, dont certains modeles qu'on ne produit plus maintenant depuis au moins le début des années 80, rodent aux alentours de la gare principale. Decidement, la maladie n'evolue pas assez vite, quand arrivera t'il a se lever assez tot pour pouvoir profiter des magasins avant leur horaire de fermeture ?
Heureusement, des gros centres commerciaux capitalisto-americanisants sont ouverts. On y trouve de tout, des Klonibsberger Klopse, des Rinderroulade, de la biere ou encore de la biere. Seulement, la non plus l'accueil n'est pas chaleureux. "Moment, bitte". Il n'a qu'une carte bleue. Lui qui croyait pouvoir payer avec, la machine est la, devant lui, apte a recevoir n'importe quelle carte de crédit, mais le magasin n'en accepte qu'une... Qu'il n'a pas.
18h, le gros centre commercial a tendance capitaliste ferme. Tot pour du capitalisme, non ? Hans rentre chez lui, fier d'avoir reussi a acheter de quoi se sustenter, et de quoi se couper les ongles de pied, un "Fussnagelknipper".

Dimanche.
Il pleut. Il pleuvait deja hier. Ca n'etait pas une legende, Wuppertal n'est pas seulement la ville ou il y a le plus grand Super Média d'Europe, c'en est aussi l'endroit le plus pluvieux.
Hans, apres s'etre apercu qu'il n'avait pas retourné sa liste de courses au dos de laquelle etait marqué "Parapluie", decide quand meme de continuer son exploration de l'inconnu. Arrivé en ville, le miracle se produit, un rayon de soleil, surement divin, arrive a percer l'epaisse couche de nuage, et vient frapper un 7, chiffre lui aussi divin affiché par le thermometre d'une pharmacie toute proche.
Hans a arrete de compter les pharmacies depuis maintenant une journée. Elles sont trop nombreuses, et depassent de beaucoup trop le nombre de ses doigts. Endroit le plus contagieux d'Europe ? Probable...
Bref, il repart. Il neige. Mais il faisait 7° tout a l'heure ! 20 metres (et donc une pharmacie) plus loin, le chiffre divin est devenu un 4. Il fait en tout cas vraiment trop froid, Hans s'etait d'ailleurs dit que, "bof, mi mars, va commencer a faire beau, jva pas prendre les affaires d'hiver, ca serait trop lourd". Apres la mesaventure du parapluie, deuxieme erreur.
Un peu décu par cette journée, il decide de rentrer par le métro. Enfin, le metro, le train. Enfin le train, euuh, le Schwebebahn, qui doit surement vouloir dire suspendo-metro-train. Encore un phenomene unique en Europe. Celui la, c'est meme au monde. Qui l'eut cru ?

Dimanche, Hans est rentré chez lui, il se souvient de la vie qu'il avait avant mais petit a petit, ses souvenirs s'estompent. La maladie gagne du terrain. Des "Scheiss", incontroles, sortent de sa bouche. La biere lui convient a merveille.
Dans une derniere lueur de francais, il ecrit sur son clavier

"Merci les taraces pour cette super année que j'ai passé avec vous ! Continuez a faire vibrer la funk sans vous prendre la tete ! Je vous rejoins dans six mois ! En attendant, si vous etes de passage en rhénanie du Nord, vous serez les bienvenus pour une petite biere a Wuppertal. La maladie gagne du terrain, mais il parait qu'elle se guerit des qu'on passe la frontiere. Auf wiedersehen, meine Freunde !"
  • le 19/03/2007 à 08:53 par Yannick SaxStick

    Rep - Vielen Dank !

    Courage Hans ! Plus qu'un semestre !
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